lundi 11 juin 2012

À Monsieur Elie Poigoune.


Président de la ligue de droit de l’homme en Nouvelle Calédonie.

Monsieur le président, je vous fais une lettre,
Que vous lirez peut être si vous avez le temps !
Boris Vian
Vous souhaitez tester, après les boites de nuits,
Le monde travail dont certains semblent honnis.
Cibler les employeurs est bien plus délicat,
Il s’agit de travail, pas de faire la java.
C’est d’ailleurs singulier d’avoir d’abord testé
Les lieux pour s’amuser, avant ceux pour bosser !

Avec l’emploi local et ses obligations,
L’entreprise est déjà pas mal sous la pression.
Les sections syndicales, l’inspection du travail,
Disposent de ce fait d’un super attirail !
La discrimination, devenue positive,
Ne laisse aux employeurs que peu d’alternative.

Alors préparez bien vos candidats masqués,
Vous trouverez, peut-être, un ou deux gougnafiers,
Qui ignorent le droit et leurs obligations,
Et auront échappé aux griffes de l’inspection.
Vous en ferez alors une large information,
Et montrerez du doigt quelque(s) vilain(s) patron(s).

Sachez que dans ma vie, manageur salarié,
À une mélanésienne, j’ai été confrontée.
Je l’avais embauchée, promue, formée, aidée,
Sur mes propres deniers, je l’ai désendettée.
D’abord la maladie, l’absence injustifiée,
Elle envoie sa famille, juste pour m’insulter.

Elle a démissionné, sans y être obligée.
Tout cela m’a blessé, mais c’est sans gravité.
Le plus grave est pour elle, qui est endoctrinée
Par des idéologues au racisme déplacé.
Défendre le kanak est une noble idée,
Sans mépriser les autres, c’est de l’humanité.

Vous comprendrez, j’espère, dans mes explications,
Que je suis sans rancœur, malgré des déceptions.
J’agrée votre démarche en faveur des Kanaks,
Mais toutes les ethnies doivent être dans la barque.

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Inspiration : 
Article des Nlles Calédoniennes du 11/06/2012
« Difficile de gérer les ethnies »

Alors que la Ligue des droits de l’homme vient de dénoncer la discrimination envers les jeunes kanak sévissant à l’entrée du Krystal, la clientèle s’insurge. Côté gérants, on dénonce un « testing ciblé » tout en soulignant la difficulté de gérer « alcool et ethnies ».
Dans certains établissements, Kanak et Européens n’ont pas les mêmes chances de rentrer. C’est ce qu’a voulu prouver la LDH.
Photo : Archives LNC
Le 12 octobre prochain, les patrons de la boîte de nuit Krystal doivent être entendus au tribunal correctionnel de Nouméa. Grâce à une caméra cachée, la Ligue des droits de l’homme (LDH-NC) a prouvé qu’ils refusaient l’entrée aux jeunes kanaks. 
En effet, le 13 et 20 avril, lors d’opérations « testing » choc (voir notre édition du 9 juin), les complices kanak de la Ligue ont été systématiquement refoulés à l’entrée du Krystal, basée Baie-des-Citrons.
« Il y aura d’autres testings, dans d’autres établissements, a prévenu, samedi matin, Lesly Gobille, secrétaire général de la LDH-NC. Il faut que les gérants se rendent compte de leurs pratiques. »

Bail. Et si les propriétaires du Krystal n’ont pas souhaité s’exprimer, certains de leurs confrères regrettent cette opération ciblée, soulignant toute la difficulté de gérer une
clientèle pluriethnique. D’autres sourient, voyant en ces testings un moyen de rompre avec les discriminations.
C’est le cas de Patrick Gomez. Pour lui, multiplier les testings ne pourra que « faire évoluer les mentalités. Cela permettra que tout le monde puisse se mélanger. » « Nous avons une clientèle multiraciale. Chez nous, on sélectionne en fonction de l’état d’ébriété, de l’âge et des tenues vestimentaires », ajoute le propriétaire de l’Omao et du Club (Baie-des-Citrons).
Content, Assen Ali Ben Ali l’est lui aussi. Pour l’exploitant de l’Atoll, ces testings pourraient changer beaucoup de choses. Il estime d’ailleurs qu’accueillir une clientèle océanienne a conduit au non-renouvellement de son bail, il y a six mois. « Je faisais le contraire de ce qui se passe dans d’autres boîtes de nuit. J’acceptais tout le monde. » Aujourd’hui, Assen Ali Ben Ali peine à trouver un local ailleurs qu’à Ducos.
A l’Anse-Vata, Jean-Luc Deroi, copropriétaire de La Bodega, a un avis plus nuancé : « La vérité est tout autre : on doit faire face à des dizaines de gens alcoolisés et mal habillés. Ce n’est pas une question de racisme. »
Il reproche d’ailleurs aux organisateurs du testing d’avoir ciblé le Krystal et pense qu’une plus large étude devrait être menée.

Interventions. Pour son associé, Marc Mussot, ces faits sont davantage révélateurs des problèmes de relations entre membres des différentes communautés : « Il est très difficile de gérer toutes les ethnies quand elles ont bu. L’alcool est un révélateur de rancunes intérieures. »
Lui aussi trouve que l’enquête n’est pas objective et réclame de la nuance : « Je ne suis pas d’accord quand on parle de racisme dans le cas du Krystal. » 
De son côté, la Ligue des droits de l’homme compte bien voir les propriétaires du Krystal être condamnés le 12 octobre prochain. Elle entend également élargir ses testings au monde du travail. « Il faut que ça s’arrête un jour, qu’il y ait une prise de conscience. On a laissé se poursuivre ces pratiques trop longtemps », lance Elie Poigoune, son président. La Ligue s’apprête d’ailleurs à distribuer aux associations un guide juridique contre les discriminations, à mener des interventions de prévention dans les écoles ou à surveiller les réseaux sociaux. Elle invite à créer un collectif contre le racisme.
Aujourd’hui, la loi prévoit jusqu’à cinq ans d’emprisonnement, quarante millions de francs d’amende et la fermeture d’établissements dans le cas de « refus discriminatoire. »

Que pensez-vous des contrôles à l’entrée des boîtes de nuit ?
Bumpy, 29 ans : « Ce n’est pas bien du tout »
« En Métropole, c’est exactement pareil. C’est un problème universel. On ne me laisse pas rentrer alors que je suis quelqu’un de calme et de plutôt timide. Tout ça parce que j’ai une tête qui ne leur revient pas. Ce n’est pas bien du tout. On est en démocratie, avec les mêmes droits. C’est un problème que je ne rencontre que dans les boîtes de nuit. Si on est uniquement entre copains, c’est le même tarif, il faut qu’on soit avec des filles. »

Raphaël, 22 ans : « Un problème de racisme »
« Quand on a des dreadlocks, on ne rentre pas en boîte. Pourquoi ? On est aussi des êtres humains. C’est un problème de racisme. Au Pavillon noir, le patron nous sort : “non, on a déjà notre quota”. On nous juge au faciès. En jean et tee-shirt, je ne rentre pas alors qu’un blanc si. On doit être accompagnéde femmes pour que ça passe. Ce n’est pas normal. On est chez nous et on se fait refouler par des patrons qui sont souvent d’ailleurs. »

Jonathan, 26 ans : « J’ai aussi du mal à rentrer »
« Au Pavillon noir, ils font vraiment le tri : Mélanésiens et Wallisiens ne rentrent pas, à moins d’avoir une fille sous le bras. Moi-même, j’ai du mal à rentrer à La Bodéga. Avec ma coupe, on me prend pour un militaire. La tenue vestimentaire joue énormément. Quand je suis avec des Kanak, on est refoulés. On est quatre à fêter un anniversaire et il n’y a pas beaucoup d’endroit où l’on peut aller. On nous juge vraiment sur l’apparence. »

Gédéon Richard
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