jeudi 20 décembre 2012

L’eau est douce … mais la note est salée !

L’eau source de peuplement …

Tiga n’est qu’un ilot dans l’immense océan,
Une goutte de terre où vivent quelques gens :
Quarante-deux adultes et vingt-huit enfants, 1
Qui se disent tranquilles, et pas des fainéants.
La pêche et la culture donnent quelques aliments,
Manque juste de l’eau pure, qui est fonction du temps.

Mais la technique est là, super sophistiquée,
Qui fait que l’eau de mer peut être purifiée.
Elle est pompée, filtrée, stockée, distribuée …
Et tous les habitants vont boire à satiété.
Venant de l’océan, l’eau est inépuisable,
Elle permet des projets qui semblaient incroyables.

C’est d’abord le confort qui va s’amplifier
Équipements sanitaires et machines à laver.
Et déjà la commune y construit des logements,
D’abord pour remplacer quelques vieux bâtiments,
Mais aussi pour capter de nouveaux arrivants,
Et faire de cet îlot une zone de peuplement …

Le goût de l’eau …

Désalinissateur et groupe électrogène,
Sont des équipements devenues indigènes.
L’eau traitée est potable, en plus, elle a bon goût,
Stérile douce et claire, elle a aussi un coût.
Car cette l’installation à coûter de l’argent,
Nous n’en parlerons pas, ce serait indécent.

La mairie doit encore gérer tout le système,
Payer un technicien, qui au moins l’entretienne.
L’absence de réseau est encore une gêne,
Et la distribution est encore à la peine.
Déjà sur Ouvéa, le maire a le problème,
Il sait parfaitement ce que cela entraine.

Mais l’important, ma foi, et que chaque maison,
Que chaque individu, puisse avoir sa ration.
Que cette eau purifiée aux normes européennes,
Puisse être consommée et permettre l’hygiène.
Aujourd’hui à Tiga, on boit de l’eau de « mer » :
Qui a le goût de science et de manne financière ! 2

Le droit à l’eau …

L’accès à l’eau potable s’affiche comme un droit.
Mais bien avant les blancs, ce droit n’existait pas.
Ou plutôt c’est le chef qui par nécessité,
Décidait de celui qui en bénéficiait.
Et maintenant que l’eau arrive à profusion,
Beaucoup refuse encore toute participation. 3

Certes des ethnologues et bien d’autres experts,
Nous expliquent, sans peine, que le lien à la terre,
Dans le monde kanak, inclus le lien à l’eau,
Qu’elle imprègne leur être, leurs aïeux et leurs os.
Et il n’en faut pas plus, en termes de culture
Pour justifier, sans rire, qu’ils ignorent les factures. 4

Ils semblent qu’on ait mis les tuyaux un peu tôt,
Qu’on ait ouvert les vannes pour sécuriser l’eau,
Avant de faire comprendre le coût de ces ouvrages,
Le prix que peut coûter l’entretien d’un forage.
On a d’abord donné sans vrai contrepartie,
Aujourd’hui, dans les têtes, tout doit être gratuit.

La solidarité dérive …

Tiga illustre bien nos erreurs solidaires.
Peuplée de retraités et autres allocataires,
Qui supporte sans peine un peu d’isolement
Grace à divers subsides qui sont très suffisants.
La mairie et l’état payent des équipements,
Qui risquent de coûter beaucoup, pendant longtemps.

Par solidarité, dans des lieux improbables,
On met des équipements qui semblent formidables.
De l’eau à volonté, de l’énergie solaire,
Des logements sociaux, parfois même des salaires …
Comme l’eau autrefois, l’argent tombe du ciel,
Le développement, lui, reste artificiel.

Comme dit un ancien, Tiga « couette sociale »,
Parfaitement isolée en zone tropicale.
Personne n’ira voir les excès budgétaires,
Qui sont le privilège de quelques insulaires.
La solidarité dérive vers ces ilots,
Oubliant ceux qui rament pour leur facture d’eau !

1 Les Nouvelles Calédoniennes du 18/12/201 : « À quelques encablures de Maré, Tiga dépend de la commune de Lifou, un peu plus éloignée. Sept kilomètres de long sur deux et demi de large. Soixante-dix personnes, dont vingt-huit enfants vivent ici à l’année. Quelques animaux domestiques, des roussettes, des tortues de mer protégées et des chèvres sauvages dont le nombre croissant commence à poser de sérieux problèmes de survie à la flore de l’île, complètent l’inventaire du vivant. »

2 Le coût de l’installation serait de 30 millions Cfp. Pour la distribution, un camion-citerne et une moto pompe sera bientôt livrée (source : NC1ière)

3 Nouvelle Calédonie 2025 : « A l’heure actuelle, de nombreuses communes ne parviennent pas à faire payer à leurs administrés l’eau qu’ils utilisent … C’est un cercle vicieux. »

4 Perceptions de la ressource en eau et comportements culturels associés aux îles Loyauté.
« La symbolique spirituelle est directement fonction des liens de tradition et de culture. Ainsi, puisque l’eau vient de la terre dont le kanak tire son identité, elle est significative de l’ancrage fort de la population dans une vision de la ressource eau en tant qu’élément générateur de vie, en tant que partie de la terre et donc partie de soi.
Comment accepter de payer quelque chose qui fait partie de soi, de sa terre, de ses ancêtres ? »

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